Fiche du navire

Péoria

Le Péoria est un chalutier pêche arrière en acier construit à Pasajes de San Juan (Espagne) en 1974. C’est le sister-ship de l’Angoumois (Un des 8 navires de la flotte patrimoniale du Musée Maritime de La Rochelle). Comme ce dernier,  il est pourvu d’un moteur Crepelle de 1100 chevaux.

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Une marée sur le Péoria

Avec nos reporters Claude et Christophe

 Les visiteurs qui vont parcourir les ponts et les coursives de l’Angoumois, jeune monument historique mais surtout chalutier industriel pendant 23 ans, ont besoin de comprendre comment se déroulaient le travail et la vie à bord de ce type de bateau de pêche. D’ici quelque temps, ces 38 m, témoins d’une période qui a commencé dans les années 60 auront disparu laissant le champ libre à des unités plus modernes qui occupent déjà une grande partie des lieux de pêche.

Il fallait donc filmer, enregistrer à bord de ces bateaux pour que soit restitués grâce à la vidéo les conditions de travail et l’ambiance sur une pêche arrière de la première génération comme l’Angoumois. C’est pourquoi, pour une marée en février, Christophe Tissot, cameraman expérimenté et Claude Malfart, compositeur, marin et preneur de son, ont embarqués à bord du Péoria, un sister ship de l’Angoumois. Yves Hédan, le directeur de le SARMA et Alain Normand le patron de Péoria ont accepté des passagers à bord, conscients de l‘intérêt qu’il y avait à garder un témoignage visuel et sonore du métier.

 Par un froid et brumeux samedi, ils ont donc mis leur sac et leur matériel à bord et le Péoria, avec son équipage de 12 hommes et ses passagers, a quitté La Rochelle pour mettre le cap sur les lieux de pêche, là haut, dans les eaux froides et ventées du nord Irlande. Par 56° Nord, la campagne de pêche a commencé après deux jours et demi de route. Les deux « observateurs » ont lié connaissance avec l’équipage, ils ont regardé, écouté, filmé, enregistré, vivant au rythme de la pêche, découvrant la réalité du métier, les rapports de hiérarchie et de travail, les tensions mais aussi l’amitié, les moments de détente pendant les repas.

 Un équipage en pêche

 « Nous avons découvert 12 hommes, raconte Claude Malfart : Alain, le patron, Cours à Pieds, le lieutenant, Bébert, le bosco, Maya l’abeille, le chef mécano, Serge, le graisseur, Napoléon, le cuisinier, Dominique, Popof, l’Arcachonnais, Fleurian, les matelots et Tony, le mousse. Le rythme de travail est impressionnant, la poche du chalut est à peine vidée qu’il est remis à l’eau. Alors commence l’étripage, le tri et le glaçage du poisson en cale.

 Ca se passe comme ça quand tout va bien. Mais la raréfaction du poisson, la concurrence féroce des espagnols qui occupent les meilleurs lieux de pêche avec leurs palangriers, obligent les français à pêcher sur des fonds difficiles où les croches sont nombreuses. Les croches sont des aspérités du fond, des rochers, des épaves, tout ce qui accroche le chalut et le déchire. Alors très souvent au travail du poisson s’ajoute le ramendage du filet avant de le remettre en pêche.

Si le chalut est trop abîmé, l’équipage le change pour continuer à pêcher et le boulot de réparation vient en plus de celui du poisson qu’il faut toujours éviscérer, trier et glacer en cale. C’est la priorité absolue. Le poisson, c’est le gagne-pain.

 Labourer les fonds du nord Irlande

 Inlassablement, le Péoria laboure les fonds entre 190 et 270 m dans ce secteur du nord Irlande. Deux ou trois concarnois sont là, dans ce coin ,et le Force 17, autre chalutier de la SARMA, venu rejoindre son collègue après trois jours de repos. Toutes les trois ou quatre heures, le chalut est viré et les mêmes tâches répétitives doivent être renouvelées quelques soit le temps, la fatigue qui s’accumule, les avaries de chalut. Quand il le faut, tout le monde s’y met, les mécanos et le cuisinier étripent le poisson tandis que le reste de l’équipage ramende.

Très bien acceptés et accueillis par les marins, Claude Malfart et Christophe Tissot sont partout, le premier avec son magnéto et ses micros, le second avec sa caméra sur l’épaule. « J’ai les reins « destroyed », une tendinite au poignet », raconte Christophe, au retour, « mais je ne regrette pas cette découverte du monde le la pêche. C’était passionnant. Quand j’avais 13 ans, je voulais être marin, mais ça n’a pas été possible à cause de mon asthme ».

Claude a constaté l’omniprésence du bruit du moteur, que ce soit sur la passerelle, sur le pont, dans le carré, dans les cabines. Ce bruit baigne et enveloppe tous les autres pendant toute la marée. Ce qui frappe au retour c’est le silence. Travailler et vivre dans le bruit continu de la machine, c’est cela aussi le métier.

« Les résultas de cette marée, c’est 22 tonnes de poisson, vendu en criée 16 francs le kilo en moyenne, des cours corrects estime Alain Normand, le patron. Ca nous fait un chiffre de 347000 francs. Nous avons ramené quelques espèces intéressantes comme la lotte, le Saint Pierre, du merluchon, très peu de morue et du tout venant : chien, roussette, lieu noir, églefin, raie, etc.… ». Alain Normand a été second de Claude Tanter pendant 23 ans sur le Tadorne, l’Eider, le Kresala, le Péoria avant de prendre le commandement il y a cinq ans.

 50 nœuds de vent pendant deux nuits

 « Le Péoria a 17 ans, il arrive à son terme. La ressource diminue d’année en année à cause d’un trop gros effort de pêche. Le métier a toujours connu des hauts et des bas, mais les bas sont de plus en plus bas ». Pourtant cette marée de février a été à peu près sauvée grâce à des cours qui se tenaient. Les résultats auraient pu être moins bons si le vent était monté d’un cran, car pendant deux nuits avec 50 nœuds, le bateau a été à la limite de remonter le chalut pour mettre à la cape.

Le moment du retour est toujours le bienvenu. C’est le moment où l’équipage fait la potasse, la réparation des chaluts, le nettoyage du pont et de la machine. Les autres moments pour souffler étaient les repas. « La bouffe était remarquable, estime Claude. Bravo à Napoléon, les gars de l’équipage ont été très sympas avec nous. Ils ont accepté qu’on fasse notre boulot, nous les en remercions ». Et Christophe d’ajouter : « C’est des seigneurs, y sont géants, ces mecs ».

Avec quelques heures de rushes et de son, les deux techniciens vont réaliser un montage de différents documents montrant les postes de travail et le déroulement de la marée : vidéo visibles à bord de l’Angoumois, sons permettant de recréer l’ambiance à bord pendant la pêche, pour un musée vivant grâce aux moyens d’aujourd’hui.

 

 

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